Il est de retour

Timur Vermes

Belfond

  • Conseillé par
    31 juillet 2014

    L'Allemagne étant dans l'état déplorable que l'on sait, la Providence fait appel à Adolf Hitler pour reprendre la situation en main. Le Führer se réveille donc dans un terrain vague berlinois, 66 ans après son suicide d'avril 1945. Un peu boueux, un peu malodorant, mais toujours fringuant, le sauveur de la nation prend vite la mesure de la catastrophe. Le pays est gouverné par une femme, les turcs ont envahi Berlin et il ne reste plus rien de la gloire et de la grandeur du parti nazi. Sans ressource ni toit sur sa tête, Hitler est recueilli par un vendeur de journaux, amusé par ce sosie si ressemblant et si drôle. D'ailleurs, il est très vite repéré par une chaîne de télévision qui va en faire la vedette d'un show humoristique. Charismatique, Hitler plaît aux allemands qui visionnent par milliers ses vidéos sur Youtube. Bien sûr, nul ne s'imagine qu'il est le véritable Führer revenu d'entre les morts, on le prend pour un comique provocateur, un acteur doué, certains murmurent même qu'il dit tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Car, si Hitler s'est parfaitement adapté aux nouvelles technologie, comme le portable ou internet, il n'a pas modernisé son discours et continue de clamer la supériorité de la race allemande et la nécessité d'étendre les frontières de l'Allemagne. Entouré de sa fine équipe, le Führer devient très vite incontournable sur la scène audiovisuelle, puis politique. Parce que, quoi qu'on en dise, ''Tout n'était pas mauvais'' quand il était au pouvoir...

    Voilà l'exemple parfait d'une bonne idée de départ qui, mal traitée, finit en eau de boudin. Parce que faire revenir Hitler, le vrai, pas un insignifiant néo-nazi qui n'en serait qu'une pâle copie, dans l'Allemagne de 2011, c'est une sacrée bonne idée, surtout si l'on veut prouver qu'en un tour de main son passif serait effacé au profit de ses idées nationalistes aptes à trouver un écho dans le cœur du peuple fragilisé par la crise économique.

    Même si le procédé est un peu facile, il en serait ressorti quelque chose de fort et de riche en enseignement. Mais Timur VERMES a choisi la carte de l'humour...Alors peut-on rire de tout ? Oui bien sûr, même si après réflexion on grince un peu des dents après s'être esclaffé avec un Führer un peu sonné après son réveil. Ses premiers pas sur le sol de la nouvelle Allemagne prêtent à rire et l'auteur en fait un personnage assez sympathique et drôle, perdu dans ses anachronismes. Oui on rit, mais ça ne dure pas.

    Rire, c'est partager, c'est connaître un moment de connivence, de complicité et a-t-on envie d'être complice d'Hitler ? Pour faire basculer son lecteur dans le camp des gentils, VERMES continue en tournant son héros en ridicule. Dans le monde sans pitié de la télévision, on veut en faire un comique. Lui croit disposer d'une tribune politique, eux le voit comme un bouffon qui force le trait pour faire rire son public.

    Mais le malaise vient du fait que l'on se demande qui atteint son but au final. Ses idées plaisent, les internautes publient ses vidéos qui font un tabac sur Youtube, et certains n'hésitent pas dire qu'il est dans le vrai...Sont-ils si stupides dans cette boîte de production pour continuer à rire quand il tient des propos qui font froid dans le dos ? Probablement, puisque le premier choc passé, tout ce qu'ils trouvent à dire c'est que décidément il est ''trop bon'' ! On va même jusqu'à trinquer avec lui : ''Au Führer !'', qui d'ailleurs répond ''A l'Allemagne !'', on lui fait même le salut nazi de rigueur... Naïveté ? Bêtise ? Excès de confiance ? La production et Hitler évoluent dans deux univers parallèles et l'épilogue montre bien que ceux qui croyaient manipuler leur créature finiront en dindon de la farce.
    S'il a le mérite de vouloir dénoncer la recrudescence des idées nationalistes, le racisme latent et la facilité avec laquelle les foules peuvent être ralliées à une cause sans tirer les leçons du passé, il est de retour sombre dans le ridicule et l'ennui par manque de consistance...Sans doute est-ce du à l'indigence des programmes de télé-réalité qui nivellent tout vers le bas et qui, prenant le pas sur l'auteur, ont réussi leur coup ici aussi. Pas indispensable.
    Merci à zazy qui a fait voyager son livre jusqu'à moi.


  • Conseillé par
    17 juillet 2014

    un roman réussi : drôle et grinçant!

    Au premier abord, cela fait rire, Hitler qui se retrouve dans un parc, qui ne reconnait rien de sa ville, à qui personne ne montre le moindre signe de respect dû à son rang, à sa personne.

    Il est perdu, Adolphe, dans cette nouvelle époque, car tout a changé : les médias, les jeunes, la politique, les nouvelles technologies...

    Mais bien qu'un peu étourdi par toutes ces nouveautés, il n'en perd pas pour autant le Nord! Car tous ces jeunes, peu intéressés par ce qui se passe autour d'eux, les écouteurs vissés sur les oreilles et les yeux braqués sur leur téléphone, et ces moins jeunes, asphyxiés par un débit d'informations constant et donc inefficace, sont des personnes que l'on peut vite convaincre d'adhérer à ses idées et donc, au Parti!

    C'est une époque idéale pour la propagande!!

    De fil en aiguille, il devient la coqueluche de Youtube, le personnage comique du moment, car bien évidemment, tout ce qu'il dit, personne ne peut le penser de nos jours! Quel humour!!

    Cet Adolphe est un personnage d'une intelligence incroyable, d'une organisation militaire, à l'argumentation qui rallierait à ses idées la personnes la plus réticente ( et pour preuve!).

    Ce roman est vraiment réussi!

    Il est drôle mais se révèle être au final une véritable critique de notre société ( l'écologie, les journalistes, la justice...).

    Certaines situations sont cocasses, d'autre glaçantes, ou touchantes.

    Je ne peux que conseiller cette lecture aussi bien aux jeunes ( car le style est assez simple), qu'aux moins jeunes.

    C'est une lecture qui fait réfléchir en ces temps de crise identitaire, politique et sociale.