Fabien B.

Abbey Edward

Éditions Gallmeister

Conseillé par (Fontaine Luberon)
21 janvier 2021

« Un jour ou l’autre, tout homme se doit de descendre la rivière. »

C’est par cette phrase extraite d’une vieille lettre de Paul Abbey, père de l’auteur, que débute ce recueil de douze récits censés servir « d’antidote au désespoir ». Pari gagné même si force est de constater, quarante ans après ces écrits, que notre bonne vieille Terre supporte de plus en plus difficilement les activités de ces groupes agro-militaro-industriels qui alimentent « la Machine à Puissance et Croissance Perpétuelle ». Dans la lignée d’un John Muir ou d’un Henry-David Thoreau, qu’il évoque dans la première partie du livre avec panache, humour et un sens critique très affuté, Abbey est certes un formidable conteur du monde sauvage, mais aussi un esprit libre et irréductible dont les écrits et les actes ont amené de nombreux américains à une prise de conscience écologique des années soixante jusqu’à nos jours. D’ailleurs, après avoir descendu les rivières avec Cactus Ed, lisez « Désert solitaire », publié en 1968, manifeste sublime sur la défense de la nature sauvage et déjà terriblement prophétique sur nos temps incertains. Et après l’avoir lu relisez-le.

One-Shot

Delcourt

Conseillé par (Fontaine Luberon)
17 novembre 2020

Décidément Jérémie Moreau nous surprend une nouvelle fois avec cet album d'une beauté plastique sidérante. Lauréat du prix du meilleur album au festival d'Angoulême 2018 pour "La Saga de Grimr" on retrouve dans ce nouvel opus l'articulation complexe et essentielle de l'homme dans son environnement. Nous sommes au néolithique, un âge ou les humains, dans une agitation permanente, chassent pour survivre. Penss observe intensément le monde qui l'entoure pour le comprendre. Les montagnes, les rivières, la course du soleil dans le ciel renferment un secret qu'il veut découvrir. Marginal, mis au ban de son clan, il survit à l'hiver (dans une séquence terrible mis en scène avec tact). Cette expérience inouïe va déclencher chez lui la volonté farouche de maitriser cette nature, source d'émerveillements mais aussi de cruauté. De fil en aiguille une conscience raisonnée des rouages à l'oeuvre dans la marche du monde émerge dans l'esprit de Penss, le premier homme qui va "déplier" la vie organique enfouie dans les plis de la matière.
Une aventure préhistorique et philosophique d'une fluidité exemplaire qui confirme le talent singulier de Jérémie Moreau.

Conseillé par (Fontaine Luberon)
3 novembre 2020

"Un jour la lumière s'est éteinte et les esprits sont revenus"

A partir d'un évènement réel, un choc terrible entre deux singularités, naît un récit atypique qui interroge des zones frontières : humain/bête, civilisation/nature, rêve/réalité. Si la première partie du récit évoque le drame et la reconstruction physique de l'auteur vient dans un deuxième temps des interrogations et le besoin de trouver un sens à cette rencontre.
Les Evènes, peuple de Sibérie qui accueille Nastassja Martin depuis plusieurs mois l'ont surnommé "Mathuka", l'ours, et la bête s'invite également dans ses rêves bien avant le contact... troublant non ?
L'auteur amène le lecteur sur des chemins inattendus et convoque un fond animiste que partagent certains peuples qui conservent un lien avec les puissances à l’œuvre dans la nature. Une première lecture est loin d'épuiser "Croire aux fauves", récit bref d'une incroyable densité et hanté par des âmes sauvages d'une insondable profondeur.

Prix du premier roman 2020

Albin Michel

3,99
Conseillé par (Fontaine Luberon)
18 octobre 2020

Fille de jour, héroïne la nuit

A l'instar de la chanson de Corine, Joséphine est une "fille de jour", professeure de philosophie dans un lycée de la banlieue parisienne qui se métamorphose en "héroïne la nuit" après maquillage et tenue de scène appropriée. Effeuilleuse dans un club chic de la capitale, Joséphine alias Rose Lee savoure cette vie sauvage qui lui permet peu à peu de prendre confiance, de se réconcilier avec son corps et d'affirmer son identité de femme. Hymne sensuel au pouvoir de la séduction, "On ne touche pas" navigue avec aisance entre une réalité professionnelle désespérante (les pages qui narrent le quotidien de Joséphine sont sidérantes) et un fantasme qui devient une réalité tangible et intense. Ketty Rouf touche au cœur avec un roman captivant, profondément sincère, qui s'affranchit de l'ordre moral et des conventions pour notre plus grand plaisir de lecture.